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  Entretien N° 7 : Christian BERNARD

 

 

Joueurdechecs.com : tu es élu au Comité Directeur Fédéral. Le nouveau président JC MOINGT a souligné ici męme les liens cordiaux qui vous unissent, en dépit du fait que vous avez conduit chacun une liste lors des derničres élections. Tu confirmes ?

 

Christian BERNARD : nous sommes tous deux amoureux des échecs et de notre fédération avec laquelle nous vivons depuis bien longtemps, environ trente ans pour ma part. Ces noces " de perles " nous ont permis de nous connaître et de nous apprécier en tant que membres du Comité directeur, puisque chacun ŕ son niveau de responsabilités nous avons œuvré pour faire progresser notre fédération. Je faisais partie des anciennes équipes du Comité directeur. J’ai débuté avec le Président Lambert qui a structuré administrativement la Fédération, puis aprčs une période un peu passive du temps du président Raoul Bertolo, je me suis fortement impliqué aux côtés du regretté Jean Claude Loubatičre, qui a dynamisé notre Fédération au plus haut niveau. Aprčs les turbulences de la derničre période électorale, je continue de me rendre utile ŕ la Formation des arbitres. Et comme dans toutes les associations, les " travailleurs " qui ne sont pas les plus nombreux, sont nécessaires pour accomplir les nombreuses tâches fédérales. Passé les nuages électoraux, je remarque le courage et la technicité du nouveau président (et de ses proches) et pense que les journées ne doivent pas ętre assez longues pour ses nombreuses activités.

 

Joueurdechecs.com : Dčs 1989, tu as conduit une œuvre colossale : réformer le corps arbitral français. A tes yeux, quel est le bilan ?

 

Christian BERNARD : il est difficile de parler de soi męme, mais parler de la restructuration de l’arbitrage me fait bien plaisir. Je profite de cette bonne question, mon cher Francis, pour renseigner les nouvelles générations d’arbitres sur le parcours qui s’est mis en place depuis 1989 et qui leur a permis aujourd’hui de devenir ce qu’ils sont. C’est surtout aux yeux des observateurs de tous bords qu’il faut demander quel est le bilan de cette réforme, qui a été appréciée comme une réussite fédérale. Prenant la suite du talentueux Jacques Marceil, j’ai été nommé en avril 1989 directeur national de l’arbitrage sur une proposition de François Chevaldonnet, alors directeur technique national. J’ai de suite réuni une équipe performante formée pendant les premičres années, par Bernard Sojka, Jean Claude Templeur, Charles Henri Rouah, Gilles Grelier, Michel Mounier, Jean Christophe Basaille, Serge Desmouličres, Serge Colin, Francis Corrigan. .. Nous n’étions ŕ l’époque qu’une cinquantaine d’arbitres " nationaux " formés en situation. J’ai mis en place, sous la direction de Bernard Sojka, un premier stage technique, pour fabriquer les premiers formateurs qui ont ensuite organisé leurs propres stages dans leurs régions. Un laborieux travail a été de récupérer des documents afin de faire paraître dčs la rentrée le premier " Livre de l’Arbitre ", contenant le nouveau Rčglement intérieur de la DNA, les textes et grilles officiels et le premier barčme d’indemnisation des arbitres. Avant, les arbitrages n’étaient pas indemnisés, et souvent les déplacements n’étaient pas remboursés. J’ai pris la difficile décision de créer une nouvelle hiérarchie de titres avec les " arbitres fédéraux ", et d’imposer aux arbitres nationaux le suivi d’un stage de formation et le passage des examens pour continuer, aprčs une période transitoire de deux ans, d’avoir le droit d’arbitrer. Imaginez les remarques et les pressions … Toutes ces innovations n’ont été possibles que grâce ŕ la motivation et aux compétences de toute l’équipe ŕ qui je rends hommage. Et d’année en année, nos textes, nos stages, nos examens se sont améliorés pour devenir les outils incontournables d’aujourd’hui. En 2002, j’ai profité d’avoir réalisé la plupart des objectifs annoncés, ŕ l’exception du costume de l’arbitre, pour passer la main ŕ un administrateur compétent plein d’idées et de fougue, Francis Delboë, qui a ensuite été remplacé par Stéphane Escafre. Mais quel plaisir que ces deux excellents arbitres soient les descendants de la restructuration de l’arbitrage.

 

Joueurdechecs.com : Tu as accepté de conserver une responsabilité. En quoi consiste ta mission ?

 

Christian BERNARD : étant trčs attaché sentimentalement ŕ l’arbitrage, je souhaitais conserver la gestion des stages de la Formation des arbitres. Et la nouvelle équipe m’a fait le plaisir de me confier cette mission.

 

Joueurdechecs.com : Tu as arbitré, en compagnie de Geurt GIJSSEN, le fameux match Karpov-Kasparov ŕ New York. Quelles furent les relations de ces deux joueurs légendaires avec vous deux ?

 

Christian BERNARD : cette proposition d’ętre l’un des trois arbitres de ce championnat du monde ŕ New-York en 1990 a été un honneur pour l’arbitrage français. J’ai vécu des moments inoubliables auprčs de l’arbitre principal Gijssen, qui portait la plus grosse responsabilité de ce prestigieux arbitrage. En dehors des parties qui se jouaient ŕ l’Hôtel Maclow dans Manhattan, c’est surtout lui qui était en contact direct avec Karpov et Kasparov.

Karpov est un gentleman des échecs, avec qui les contacts sont agréables et faciles. Je ne ferais pas les męmes remarques avec Kasparov, qui mčne passionnément chaque instant de sa vie comme un combat sur l’échiquier.

Par contre, j’ai ensuite en 1993 supporté toutes les responsabilités du match de championnat du monde Karpov-Timann ŕ Jakarta. Le match, le contexte, les joueurs étaient faciles ŕ gérer, les indonésiens trčs accueillants, et les deux mois se sont bien passés.

 

Joueurdechecs.com : Durant la campagne électorale, tu as fait l’objet d’attaques personnelles abominables. On t’a par exemple accusé de t’ętre " enrichi " avec cet arbitrage de New-York, alors que la somme versée compensait tes frais ainsi que le congé sans solde que tu as dű prendre pour t’absenter plus d’un mois. Face ŕ toutes les calomnies, je t’ai trouvé digne et calme. Mais quand męme, pourquoi n’as tu pas contre-attaqué ?

 

Christian BERNARD : depuis plus de trente ans que je " baigne " dans le monde des échecs, j’ai toujours respecté les valeurs associatives : passion, travail, éthique et bénévolat en donnant mon temps libre, en moyenne 25h/semaine, ŕ la présidence de mon club ou ŕ celles des comités directeurs départemental ou de ligue et ŕ la Fédération. Je suis un " associatif " et non pas un " politique ". Je n’ai donc pas voulu perdre du temps en répondant aux violentes et injustes attaques politisées de cette campagne électorale, sauf quand mon honneur était mis injustement en cause.

 

Joueurdechecs.com : Pourquoi par exemple ne pas avoir communiqué puissamment, grâce ŕ Internet, pour dire ce que tes proches savent, pour dire que tu as scrupuleusement versé le " reliquat " ŕ ton cher club d’Orange ? Pourquoi ne pas avoir dit que pendant plusieurs années, avec tes indemnités d’arbitrage, tu fus un donateur régulier et généreux pour ton club ?

 

Christian BERNARD : je n’ai pas voulu entrer dans l’escalade de ce jeu malsain des attaques-réponses, qui dégénčre dans la vulgarité et qui fait perdre trop de temps, si utile pour construire. Dans la mesure du possible j’ai préféré débattre seulement sur le plan des idées, sachant que je n’étais pas expert sur l’échiquier politique.

 

Joueurdechecs.com : Aprčs avoir tant offert ŕ la FFE, ton temps, ton énergie, ton argent, te faire calomnier ainsi m’a littéralement écœuré. Est-ce le triste sort réservé aux bénévoles de nos jours ? Ce déchaînement de haine est-il lié ŕ l’avčnement d’Internet et des " forums " ?

 

Christian BERNARD : le principal est que mes proches connaissent la vérité. Comme aux échecs on attaque le roi, j’étais au sein de mon équipe l’homme ŕ abattre. Je regrette pour mon équipe réunissant tant de personnes dévouées et motivées et pour toutes les personnes qui m’ont soutenu, qu’un associatif ne soit pas sorti vainqueur de cette bataille. Cela prouve aussi que notre fédération est en train de devenir une future grande fédération sportive.

 

Joueurdechecs.com : La Toile a-t-elle aussi de bon côtés ?

 

Christian BERNARD : comme aurait pu le dire Démosthčne de nos jours : " Internet est la meilleure et la pire des choses " . J’ajoute qu’ŕ part quelques forums qui permettent ŕ certains individus de se défouler, la toile est un outil formidable et nécessaire en particulier pour le monde associatif : chacun peut y trouver ou y présenter, rapidement, ce dont il a besoin. La plupart des sites échiquéens, dont celui de la Fédération, sont remarquables, sans oublier le fameux petit dernier de " Tonton Francis " !

 

Joueurdechecs.com : Que penses-tu de la place de la France au sein des instances de l’arbitrage, ŕ la FIDE ? Avons-nous assez d’arbitres internationaux français, ŕ ton avis ? Comment faire pour que naissent des vocations ?

 

Christian BERNARD : en 15 ans, le corps arbitral français s’est fait remarquer. Il est passé de 50 arbitres individuels ŕ un corps de 1200 arbitres formés sérieusement. Mon objectif d’un arbitre par club est męme dépassé. Notre force ? c’est l’ensemble des activités de formations hiérarchisées, d’examens anonymes, des textes actualisés et appliqués et de la formation continue qui se met en place. Notre modčle international ? c’est notre corps arbitral diversifié, l’ensemble des formateurs et des correcteurs compétents et cette toile des directeurs régionaux d’arbitrage qui couvre maintenant notre territoire. J’ajouterais que par ton action pendant ta direction ŕ l’arbitrage, tu partages une part de cette réussite. L’objectif actuel est de faire progresser la qualification de nos meilleurs arbitres en augmentant le nombre des arbitres fédéraux 2 et 1 et internationaux. La direction de l’arbitrage s’y emploie. C’est l’image sérieuse de la majorité des arbitres français et la nécessité de posséder des arbitres pour jouer les interclubs qui continueront de faire naître des vocations, permettant le remplacement des arbitres vieillissants.

 

Joueurdechecs.com : Joues-tu encore aux échecs ? Comment se porte le club d’Orange ?

 

Christian BERNARD : ah, Francis, bonne question ! Depuis tant d’années données " aux papiers " j’ai perdu plus de 300 points de classement … Mais j’ai toujours envie de fréquenter la belle Caďssa, et depuis un an et demi je me suis remis ŕ jouer un peu plus sérieusement en équipe de Nationale 4 ou 5 avec mon club. Aprčs avoir vécu les " dix glorieuses " en NI et TOP 16, l’Echiquier Orangeois a décidé pour des raisons principalement financičres de retomber directement en NIV, avec des joueurs orangeois et surtout des jeunes qui montent grâce ŕ la formation donnée par le Maître Laurent Guidarelli dans notre école d’échecs. Enfin, nous avons organisé pour la premičre fois un tournoi " Echecs-loisirs " qui a réuni une trentaine d’amateurs non licenciés dans un club. Nous continuerons dans cette voie prometteuse. Et merci d’avoir donné la parole ŕ un ancien, toujours motivé pour servir notre fédération.

© Progerix